• Il y a de nombreuses années, sur un forum anglo-chinois, on discutait du proverbe 舐犊情深 (shì dú qíng shēn), exprimant l'amour d'une vache léchant son petit veau. J'ai traduit le mot veau par l'anglais veal. Quelqu'un m'a dit alors que veal n'est pas un veau, mais de la viande de veau. Horreur !

    En chinois également, il y a eu des caractères créés spécialement pour exprimer tel ou tel attribut. Cela a cessé heureusement. Voyons ensemble quelques-unes de ces curiosités, extraites de Shuowen ou de 尔雅 (Erya).

    Pelage

     (qí), cheval vert-noir avec un pelage en damier

     (lí), cheval noir

    (xuān), cheval au pelage cendré

    (guī), cheval gris

    (liú), cheval bai avec crinière et queue noires

    (xiá), cheval roux et blanc

    (luò), cheval blanc avec crinière et queue noires

    (yīn), cheval gris et blanc

    (diàn), cheval noir avec le dos jaune

    (yuán), cheval roux avec un ventre blanc

    (yàn), cheval avec une croupe blanche

    (yù), cheval noir avec une croupe blanche

    (jǐ), cheval avec patte de devant gauche blanche

    (qǐ), cheval avec patte de devant droite blanche

    (zhù), cheval avec patte arrière gauche blanche

     (xiāng), cheval avec patte arrière droite blanche

    (xí), cheval avec les deux pattes de devant blanches

    (xí), cheval avec de longs poils au-dessous des genoux

     

    Âge

    Caractères spécifiques (huán), cheval d'un an

     (jū), cheval de deux ans

    (táo), cheval de trois ans

    Caractères spécifiques (bā), cheval de huit ans

     

    Taille

    (lóng), cheval haut de plus de 8 (chǐ)

    (róng), cheval de 8

    (lái), cheval de 7 .

    (chún), bœuf de 7

    (qián) mouton de 6

    (è), cochon de 5

    (áo), chien de 4 , mais c'est sans doute plutôt une race

    (kūn), coq de 3 .

     

    Portée

    (zōng), trois chiots

     (shī), deux chiots

    (qí), un chiot

     

    Culture d'un champ

    (zī), champ après une année de culture

    新田 (xīn tián), après deux années

    (yú), après trois années

    Pour , Shuowen et Erya parlent de trois années, mais une ancienne version de Shuowen parlait de deux années, semble-t-il.


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  • Il y a quelques jours, en écoutant un conte pour enfants enregistré à Taïwan, j'ai remarqué avec surprise que , à la fois conjonction et et préposition avec, se prononce hàn à Taïwan et non .

    Une petite recherche m'apprend que cette prononciation hàn ne venait pas d'un dialecte taïwanais, mais d'un dialecte de Beijing. Comme on sait, le mandarin est basé sur le dialecte de Beijing, capitale oblige. Ce hàn a été propagé à Taïwan où il est toujours en usage, alors qu'il a disparu maintenant du mandarin officiel du continent.

    La Chine tend à simplifier un peu la prononciation, mais Taïwan privilégie les anciennes prononciations quand elles ont un sens particulier.

    Par exemple, (chī) signifie manger. Mais on l'utilise aussi dans l'expression 口吃 (kǒuchī), bégayer. À Taïwan, 口吃 se prononce kǒují. Ce est donné par Shuowen, qui ne reconnaît que le sens de bégaiement pour , manger se disant (shí) en chinois classique. Notez que nous avons parlé à plusieurs reprises de dans notre blog.

    Il y a d'autres cas où c'est le ton qui change.

    Voyons 相亲 (xiāngqīn). Il a deux sens :

    - tenir l'un à l'autre (c'est le de réciprocité)

    - rencontre arrangée de deux jeunes gens en vue d'un mariage.

    Dans le second sens, à Taïwan, se prononce xiàng, car il signifie regarder, choisir, et non plus réciproquement.

    Le respect strict de la tradition peut jouer parfois des tours.

    Voyons (ái), cancer. On dit ou 癌症 (áizhèng), cancer, ou 肺癌 (fèi'ái), cancer du poumon.

    J'ignore pourquoi on utilise le caractère pour le cancer, mais peu importe, examinons ce caractère de plus près.

    est composé de :

    • Partie sémantique : (chuáng ou nè), Prononciation du mandarin de Taïwan en ossécaille. Cela représente un homme appuyé contre un lit ; c'est la forme originelle de (jí), maladie.
    • Partie phonétique : (yán), Prononciation du mandarin de Taïwan en ossécaille. Cela représente trois rochers sur une montagne, les trois carrés correspondant à des rochers, et non à des bouches. Aujourd'hui, s'écrit (yán), avec une seule pierre (shí).

    Donc, devrait se prononcer comme 嵒/岩, c'est-à-dire yán au lieu de ái. C'est effectivement ce qui se passe à Taïwan ; c'est aussi le cas en cantonais, 癌/嵒/岩 se prononçant tous trois ngaam4.

    Le problème avec le mandarin de Taïwan est qu'il n'y a plus de différence entre 肺癌 (fèiyán), cancer du poumon, et 肺炎 (fèiyán), pneumonie, ce qui est un peu gênant. On commence donc à dire (ái) également à Taïwan.


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  • Dans la première partie, Signes de ponctuation chinois (1), nous avons parlé d'une polémique sur l'interprétation de 子曰民可使由之不可使知之.

    Nous allons présenter ici une interprétation rectifiée par Confucius, sous la plume du légiste 韩非子 (Han Fei Zi), -280 à -233. Édition 1777.

    Signes de ponctuation chinois (2)

    Le prince 鲁哀公 (Lu Ai Gong) demande à Confucius : on dit que n'avait qu'un pied (夔一足, kuí yī zú, littéralement 夔 un pied), est-ce vrai ?

    Mais non, répond Confucius. 夔 était méchant, on ne l'aimait pas. S'il était toléré, c'est parce qu'il était digne de confiance, car cela seul suffisait. Par 夔一足, dit Confucius, il faut donc comprendre 夔一,足 (夔 seul, suffit), et non 夔,一足 (夔, une jambe).

    NB. initialement pied/patte, signifie suffisant également.

    Une autre version dit que 夔 ne connaissait rien d'autre que la musique. Le roi , Yao, dit que cela suffisait, et en a fait son officier de musique.

    Avec ou sans le personnage de Yao, il s'agit d'expliquer que le dénommé 夔 a bien deux pieds comme tout le monde.

    Cependant, d'après un autre texte classique, Confucius connaissait la légende d'un monstre appelé 夔. Encore un autre texte, bien postérieur il est vrai, précisera que c'était un monstre à un pied.

    Je n'ai pas trouvé de texte contemporain de Confucius parlant de monstre 夔 à un pied. Mais il est beaucoup plus vraisemblable qu'Ai Gong interrogeait le Maître sur l'existence d'un monstre et non d'un homme.

    La légende du monstre à un pied est-elle née d'une mauvaise interprétation de 夔一足, ou bien Confucius a-t-il voulu chercher à tout prix une explication rationnelle à la légende ?

     

    Articles de la série Signes de ponctuation chinois

    http://shangdaer.eklablog.com/signes-de-ponctuation-chinois-1-a108709084

    http://shangdaer.eklablog.com/signes-de-ponctuation-chinois-2-a108904988

    http://shangdaer.eklablog.com/signes-de-ponctuation-chinois-3-a109005512

    http://shangdaer.eklablog.com/signes-de-ponctuation-chinois-4-a109137484

    http://shangdaer.eklablog.com/signes-de-ponctuation-chinois-5-a109228918


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  • Le chinois a un système de ponctuation un peu particulier que nous examinerons ensemble.

    Mais, auparavant, voyons quelques textes chinois anciens dont la particularité est de ne pas avoir de signe de ponctuation, particularité qu'ils partagent par exemple avec le latin ancien et... le thaï moderne.

    Dans 大戴礼记 (Da Dai Liji), dynastie Han (-202 à 220), première colonne de l'image ci-dessous, nous lisons : 孔子閒居曾子侍孔子曰參今之君子惟士與大夫之言之閒也……

    Signes de ponctuation chinois (1)

    Décortiquer la structure des phrases en fonction du contexte, cela s'appelait 句读 (jùdòu), étant une pause à l'intérieur d'une phrase, et la fin de phrase. Cela faisait partie des choses à apprendre par les jeunes enfants. 三字经 (sānzìjīng), le Classique des Trois Caractères, dit explicitement qu'il faut 明句读 (míng jùdòu), comprendre le 句读.

    Avec la ponctuation moderne, la lecture de notre texte devient plus facile : 孔子閒居,曾子侍。孔子曰:“參,今之君子,惟士與大夫之言之閒也……

    Mais il peut arriver qu'un découpage ne fasse pas l'unanimité. Par exemple, dans le chapitre 泰伯 (Taibo) de 论语 (Lunyu), les Entretiens de Confucius, le passage suivant fait polémique : 子曰民可使由之不可使知之.

    L'interprétation la plus courante est 子曰:“民可使由之,不可使知之” : on peut laisser au peuple une certaine liberté, mais on ne peut pas lui laisser la connaissance.

    Un tel obscurantisme est-il digne de Confucius ? D'autres découpages de cette phrase ont été proposés, mais cela sort du cadre du présent article.

    Même en 1795, à la dynastie Qing, nous avons encore des textes sans ponctuation :

    Signes de ponctuation chinois (1)

    La situation est en réalité plus complexe. Il y avait bien des signes de ponctuations très tôt, dès l'ossécaille et le bronze semble-t-il, mais leur nombre et leur usage étaient extrêmement limités et n'étaient pas normalisés. Même au début du siècle dernier, on utilisait souvent encore un seul signe, le cercle .

    Voici un texte datant de l'époque Ming, avec seulement des cercles :

    Signes de ponctuation chinois (1)

    Et voici une pièce rare. Il s'agit de La vie et les aventures surprenantes de Robinson Crusoé, traduit en... cantonais par un missionnaire anglais en 1902 (dynastie Qing). Ici, il n'y a que le signe :

    Signes de ponctuation chinois (1) Signes de ponctuation chinois (1)

    NB. Vous noterez sur la page de couverture, qu'il faut lire aujourd'hui (lìchéng, 历程 en simplifié), parcours, ici dans le sens d'aventures. En effet, l'empereur mandchou Qian Long (1711-1799) s'appelait (Hong Li, 弘历 en simplifié), il était donc tabou d'écrire ou sous les Qing, d'où la variante ici.

     

    Articles de la série Signes de ponctuation chinois

    http://shangdaer.eklablog.com/signes-de-ponctuation-chinois-1-a108709084

    http://shangdaer.eklablog.com/signes-de-ponctuation-chinois-2-a108904988

    http://shangdaer.eklablog.com/signes-de-ponctuation-chinois-3-a109005512

    http://shangdaer.eklablog.com/signes-de-ponctuation-chinois-4-a109137484

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  • L'été se dit (xià) ou 夏天 (xiàtiān) ou 夏季 (xiàjì), avec signifiant ciel, jour, et saison. était aussi le nom de la première dynastie chinoise, et a toujours représenté ce qu'on appellera plus tard la Chine.

    L'origine de est assez controversée.

    Selon une première théorie, viendrait d'une déformation de Que nous raconte l'été ?, c'est-à-dire de (chán), cigale, insecte estival par excellence. Je vous laisse en juger. À propos, la cigale a aussi comme nom populaire 知了 (zhī le), d'après leur chant strident.

    D'autres affirment que représentait une danse de cérémonie. Dans les textes classiques tels que 礼记 (Liji), Le Livre des Rites, nous trouvons en effet la mention de 舞大夏 (wǔ dà xià), danser le grand ; nous avons aussi 九夏 (jiǔ xià), les neuf musiques .

    Que nous raconte l'été ?

    Une autre théorie dit que désignait à l'origine la dynastie de même nom, et que était une déformation du nom de capitale (Ji). Comme autre exemple, nous savons que la dynastie (Shang) a pris plus tard le nom de (Yin) après le déplacement de la capitale à .

    Les deux caractères et sur bronze sont en effet très ressemblants. Pour , nous voyons distinctement une tête, deux mains et deux pieds. Pour , c'est la même chose. En effet, son composant supérieur, Que nous raconte l'été ?, est aussi une variante de (shǒu), tête. Quant aux mains et pieds, ils sont toujours reconnaissables.

    De capitale, 冀/夏 a sans doute donné le centre, d'où la notion d'empire du milieu. Peut-être la saison du milieu, l'été , vient-elle aussi de là.

    Pour terminer, signalons que, suivant l'énergétique chinoise, l'été est associé au feu pour l'élément, au rouge pour la couleur, au cœur et à l'intestin grêle pour les organes, au Sud pour l'orientation.


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