• Un pas de deux

    Nous n'allons pas parler de danse, mais du pas chinois, (bù), qui n'a pas toujours été un pas, mais deux.

    En effet, le tableau suivant montre clairement que correspondait à deux de nos pas :

    Un pas de deux

    Il y a un terme classique 步武 (bùwǔ) qui représente une courte distance, parce que c'est compris entre un pas ( au sens d'un pas ici, le étant une trace de pas) et deux pas ().

    Un de nos pas se disait (kuǐ) dans le dictionnaire Shuowen, puis plus tard. Notons que, d'après un linguiste, cela pourrait venir de (kuà), enjamber.

    Nous avons par exemple le passage suivant : 不积跬步,无以至千里,不积小流,无以成江海 (荀况, -310 à -238 environ), sans cumuler pas après pas, on n'atteindra pas mille lis ; sans cumuler les petits ruisseaux, on ne formera pas de fleuves ni de mers.

    Jusqu'à l'époque Qing, on rencontrera encore ce dans la littérature, ce qui pose la question de la signification réelle de dans certaines expressions classiques.

    七步成诗 (qī bù chéng shī), faire un poème en l'espace de sept pas.

    曹丕 (Cao Pi), fils de 曹操 (Cao Cao, 155-220), a toujours été en compétition avec son jeune frère 曹植 (Cao Zhi). Devenu roi, il a cherché un prétexte pour tuer son frère en lui ordonnant de faire un poème en marchant sept pas. Non seulement 曹植 a réussi avec brio, de plus son poème fait allusion au harcèlement dont il est l'objet.

    Ici, il s'agirait en réalité de 14 de nos pas, mais ce serait quand même un grand exploit.

    百步穿杨 (bǎi bù chuān yáng), percer à l'arc une feuille de saule à cent pas.

    Ces cent pas correspondent vraisemblablement à deux cents de nos pas, c'est-à-dire environ 80 m. Pas mal.

    Là où ça se corse, c'est que, suivant les périodes, représentait aussi une distance de cinq à huit (chǐ) qui, lui-même, était variable. À l'époque Qin qui nous intéresse, un correspondait à six de 23 cm. La feuille de saule serait donc à 140 m environ. Encore mieux !

    Remarque

    correspondait à deux de nos pas, disais-je. J'ai eu la surprise de découvrir que c'est encore vrai dans un cas précis. Il s'agit de 步幅 (bùfú), avec qui était initialement le lé d'une pièce d'étoffe (d'où la clé , jīn), et qui désigne maintenant une largeur ou une étendue en général.

    En marche ou en course à pied, la longueur de foulée 步幅 est la distance entre les pointes des empreintes du même pied, ou la distance entre les talons des empreintes du même pied. La définition est certes imposée par les normes internationales, mais mérite quand même d'être mentionnée.

    PS. J'ai noté une curieuse coïncidence entre le français et le chinois : on dit pas (le nom) et pas (la négation) en français, et (bù, le nom) et (bù, la négation) en chinois...


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